Résumé du livre "L'incandescence de la lettre en poésie" d'Alain Tito Mabiala par Jean-Paul Ilopi

 Ma recension " L’incandescence de la lettre en poésie ",  recueil d’Alain Tito Mabiala, faite lors de la présentation de cet ouvrage au Centre Culturel Miezi à Kinshasa le 10 septembre 2021.

 

Mesdemoiselles, Mesdames, Messieurs,

Distingués invités, à vos multiples titres et à vos qualités diverses,

Très chères littérateurs, et très chères littératrices,

Bienaimé(es) amis et  amies de la littérature,


Encore une fois, me voilà commis à la tache de donner un avis de critique sur un ouvrage édité par les éditions Mikanda, qui ont avec beaucoup de panache fait leur rentrée littéraire, à travers les vernissages des œuvres de littérature qu’elles ont mises depuis un bon bout de temps à la disposition des amateurs des belles-lettres, dans une fréquence inouïe, inhabituelle depuis l’avènement des éditions du Mont Noir, vers le début des années 70. 


" L’incandescence de la lettre en poésie ", que j’ai eu l’honneur d’analyser, tel est le titre du nouvel opus poétique d'Alain Tito Mabiala, ce  littérateur et journaliste congolais avéré, qui vit actuellement en Suisse, à Fribourg, si je ne me trompe, après avoir séjourné pendant assez longtemps à Lausanne.  


A mon humble avis, cet écrivain congolais que nombre d’internautes connaissent sous son pseudonyme de plume de « Lisala Pepele ya Bomoto », s’impose de plus en plus dans le monde littéraire d’ici et d’ailleurs, grâce à sa capacité créatrice des œuvres de très bonne facture, qui surfent entre la poésie et la prose, avec une dextérité de funambule. 


Il est tellement fécond, d’aucuns disent prolifique, mais absolument innovant, notre Alain Tito Mabiala national, que les lecteurs non avisés n’arrivent quelquefois pas à faire le vrai distinguo entre le genre narratif et celui poétique qu’il use d’une manière si abondante dans ses prestations écrites, tellement sa prose est truffée d’ingrédients poétiques, et sa poésie s’annonce avec une fulgurance prosaïque. Mais au finish, c’est la littérature qui sort vainqueresse de cette géniale remise à jour de l’écriture congolaise, une mise à jour que j’aime souvent qualifier de régénérescence. 


Dans son recueil de poèmes ci-haut titré, recueil de poème dont j’ai eu le parfait bonheur de préfacer, lequel a d’ailleurs reçu le prix des lecteurs des éditions Mikanda, cette maison d’édition gérée par le jeune prodigieux poète Youssef Brahn, qui a permis au grand public d’entrer en possession de ces admirables écrits, ce virtuose de l’écriture impose d’emblée à ses lecteurs une célébration cérébrale de ses stances surréalistes, qui ressemblent un tantinet aux voltiges de l’écriture automatique, chère aux disciples, ou aux condisciples, d’André Breton. 


Est-ce pour lui un moyen magnétisant, ragaillardissant, pour aboutir à l’incrustation, ou à la scrutation, de ses avis judicieux, mais souvent teintés de sarcasmes, avec un penchant vers le tumulte, pour ne pas dire vers la révolte, afin de mettre un terme aux diverses iniquités que vivent les peuples d’Afrique, dans leurs propres pays, comme dans ceux de leurs asiles ? Est-ce que ce poète cherche à ainsi camoufler ses lubies pour créer des lobbies à travers ses hobbies littéraires ?


Aux précédents questionnements, on est vraiment tenté de répondre par l’affirmatif. Puisque dès l’entrée de jeu, l’auteur de cet opus poétique le susurre à travers cette citation de Charles Baudelaire qui dit : " Quel est celui de nos jours qui n'a pas, dans ses jours d'ambition, rêvé le miracle de la prose poétique, musicale, sans rythme et sans rime, assez souple et assez heurtée pour s'adapter aux mouvements lyriques de l'âme, aux ondulations de la rêverie, aux soubresauts de la conscience ?" 


En tout cas, après s’être adoubé de cette conviction énergisante, ce poète iconoclaste va abreuver ses lecteurs d’une poésie délirante, qui met en évidence la magie de la poétique en prose, en vue d’exorciser ou d’encenser son milieu ambiant, à travers des choses qui l’éblouissent, ou qui le frustrent, pourquoi pas, pour vitupérer ou dénoncer avec ses mots éthérés, les maux qui proviendraient de la déliquescence axiologique de nos sociétés modernes malades, minées par un égocentrisme outré, tirant sa source de la concupiscence, guindées par le mépris d’autrui, la réification des faibles, l’exploitation de l’homme par l’homme, la paupérisation de la majorité par une minorité trop gloutonne. 


Quand vous lisez son recueil de poèmes ici mis en exergue, comme j’ai déjà eu à le souligner dans ma préface, vous noterez avec un grand enthousiasme qu’Alain Tito Mabiala a usé d’une réelle liberté de ton pour façonner des phrases qui ont profité de la théurgie de la poésie, en vue de redresser les torts, ou de louanger les vertus du sort. En effet, des poèmes comme « Au calme de chez moi, je médite », « Mûrir dans la sainteté de la poésie », « Lausanne nous en veut », « Des ombres faméliques », « La mort injuste qui nous ceint », « La république bananière de mon pays », « L'empreinte d'un texte », ou « Le vœu de se confesser sur ma langue », en sont-là de vraies illustrations lyriques.

 

Lorsqu’on aborde alors des pièces poétiques comme « Le charme du crépuscule », en bifurquant vers cet « Infiniment petit qui nous tient en joue », pour déboucher sur « Le confinement », où le scribe met en exergue « La solitude du confinement en poésie », avec « Le corona virus qui nous impose son silence »,  « d'Un matin sous le règne du Kaiser Corona Virus » à « Un matin seul », le rhapsode entraîne son lecteur vers « Chaque jour nous conduit vers l'inéluctable fin », où l’humanité en péril  dévoile de plus en plus la vulnérabilité de notre être, avec le poème « L’obsession de la raison dans la folie de la déraison ». 


Dans le poème titré « Les femmes précieuses que sont nos mères », précieuses pour leurs attentions, pour leurs abnégations et pour leurs amours non amers, le poète a fait un grand câlin à nos procréatrices, une véritable ovation à nos génitrices, non comme Œdipe vis-à-vis de sa maman, mais comme un vrai matrilinéaire Kongo, conscient du rôle important de l’utérus dans la reproduction du genre humain. 


Le voilà conduire aussitôt son lectorat dans « Le rêve avant tout », où il extasie la contemplation intérieure de l'existence, qui amène à la plénitude créative. Lorsqu’il a décrété « Le sourire comme expression de la bonté du cœur », au fur et à mesure qu’on avance dans le déchiffrage du recueil ahurissant d’Alain Tito Mabiala, on découvre enfin cette pugnacité poétique, qui se veut forcément cognitive, même si le poème « Rire pour se désintoxiquer du mal que vous infligent les hommes » vient donner un atour thérapeutique pouvant  délivrer les humains de leurs inconstances, avec « L’humilité et l’écriture pour dompter les vicissitudes de la vie ». 


Pour alias Lisala Pepele ya bomoto, dans « le legs à ma fille », par exemple, il pense que son héritage ne sera constitué que des mots, mais pas n’importe quels mots, mais plutôt ceux qui font l'éloge de la piété et de l'humilité. « Ce que dit le regard d’un vieux », «  La fragilité dans l’ennui », « L’incertitude de comprendre de quoi est fait le monde », « Prière d’aimer la vie et le monde », « La transe des mots s’avère absente et capricieuse », « Un homme seul et accablé », « Poésie aux premières heures du jour avant que le soleil ne pose sa prose lumineuse sur le monde », « L’année des hier s’en va et la nouvelle pleine des demains arrive », « Un matin plein de philosophie », « Le cœur et le corps au centre de tout poème », « Chaque nuit est une énigme pour qui sait lire entre les lignes » sont là l’expression d’une poétique novatrice. 


En fait, c'est le poème titré « L'essence de tout écrit » qui donne le sens de sa poétique féérique, laquelle tire son substrat de celui titré des « Entrailles du monde qui m'aspirent depuis mon canapé ». C'est donc «  La laideur des âmes  qui pollue la simplicité et la clarté du monde », ainsi que « La poésie m’habite et m’a choisi » qui donnent le relais à celui titré « Le pouvoir des mots conférés au poète », qui le modèle, pendant que celui-ci observe le ciel pour que « Les bielles fonctionnent lorsque le soleil dessine l'ombre du poète sur le quai », afin de se prémunir de la laideur qui obstrue la simplicité et la clarté du monde, où « Le mal peut aussi se revêtir de la splendeur d’un sourire angélique pour masquer sa laideur ».


En conséquence, cette poésie qui l'habite, et qui l'a choisi depuis le ventre de sa mère (Monique), devient alors « Un moment de résilience ». Mais comme Dieu l'a voulu poète, avec « L'odeur et la couleur de mes nuits », cela rend ses nuits insomniaques, puisqu’à chaque instant de la nuit, il reste éveillé par l’envie de se mettre à la disposition de son inspiration multiforme. Toutefois, des « Jours orphelins de poésie », comme il l’écrit si bien, où rien ne s'affiche sur l'écran de la créativité, existent aussi pour lui. Cependant, comme ce complot ne triomphera pas sur sa vivacité productrice, on trouve alors toute la quintessence de sa démarche poétique dans le poème titré « Plaidoyer en poésie ».

                                                                                                                            A l'instar de Papa Wemba, dans son apologie de l'élégance (la Sape) et du courage, Alain Tito Mabiala pense qu'on peut être pauvre en biens de ce monde, mais bien riche en biens de l’esprit, car « sous le soleil n’est pauvre que celui qui veut ». Ainsi, à la suite des poèmes titrés « Le soleil dessine mon ombre sur le quai », « La pluie, de l’herbe, le quai »  « la Poésie d'un été solitaire et tristounet », « Les bruits du dehors », « Joint », « avant que le jour n’arrive, le poète veille », « C'est la vie »,  « Le café et la belle blonde d'orbe », sans omettre « Le poète s’expulse du vide pour se remplir des poèmes », et tant d’autres,  vient alors l'aveu de cet auteur atypique, qui va finalement fixer ses lecteurs sur sa boulimie littéraire dans « Écrire est une thérapie ». 

                                                                                                                                 En tout cas, avec « L'incandescence de la lettre en poésie », Alain Tito Mabiala a dévoilé son ancrage poétique avec un surréalisme newlook, qui mérite de faire des épigones, pourquoi pas des émules. C’est là où, sans peur d’être contredit, je puis me permettre d’affirmer, pourquoi pas de confirmer, et c’est aussi l’avis des lecteurs des éditions Mikanda éparpillés à travers le monde, qui lui ont décerné leur prix, que dans la littérature africaine de la diaspora, voire de l'intérieur du continent noir, il n'y a pas beaucoup de poètes qui font un décryptage de la poésie avec autant de perspicacité, avec autant de sagacité, bref, avec autant de luminosité, qu'Alain Tito Mabiala. 

                                                                                                                     Lorsqu’on lit l’opuscule poétique qui va d’ici-là être amené aux fonts baptismaux à Paris, semble-t-il, on décèle illico presto cette extase vibratoire qui vous met en transe durant tout son déchiffrement. En effet, dans son recueil en prose poétique paru aux éditions Mikanda à Kinshasa, en RDC, dont je vous recommande fermement la lecture, on découvre en fait comment ce grand artiste joue avec le langage et la sonorité des mots, et comment il a travaillé le rythme de ses phrases méticuleuses, en vue de produire de vrais ravissements chez ceux qui le lisent. 

                                                                                                                            Il ne me reste alors plus qu’à féliciter Alain Tito Mabiala, ce grand manipulateur des mots, pour son exquis et admirable ouvrage, de remercier son éditeur, pour nous avoir enfin donné l’occasion de découvrir une poésie qui ne court pas les rues, et de remercier d’avance l’auditoire, pour sa sympathique attention, et surtout, pour ses frénétiques applaudissements. 

                                                                                                                  Jean-Paul Brigode ILOPI Bokanga,

Poète, Écrivain, Journaliste et animateur culturel.

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