La st-Sylvestre n'a pas produit les effets escomptés au Congo-Kinshasa et le statu-quo demeure et se consolide...

Kabila, enfin dans son glissement! 
Joseph Kabila, président depuis plus de dix ans en République Démocratique du Congo, est arrivé au terme de son dernier mandat. Cela s'est passé en décembre 2016. L'opposition à son régime accentuait la pression pour qu'à la date de la fin de son mandat qu'il s'en aille. Les ténors de plusieurs partis, dits de l'opposition, sont montés au créneau pour sensibiliser l'opinion nationale sur l'infamie que serait le maintien de Kabila au-delà de ce qui est prescrit dans la constitution et dans la loi électorale. Ces alarmes ont eu pour effet des journées de mobilisation populaire dans Kinshasa, où le peuple a manifesté son mécontentement, réprimé dans le sang par le pouvoir qui n'appréciait pas trop l'expression démocratique de cette liberté d'expression populaire. D'ailleurs, les partisans du parti présidentiel et ses alliés ne se privaient pas de proclamer ouvertement leur intention de voir le président Kabila demeurant dans le jeu politique moyennant une modification de la constitution pour conformer leur volonté à la loi suprême qui régit le pays.
Plus les déclarations antagonistes se multipliaient, plus le climat devenait délétère et le malentendu ne faisait que croître avec un chef de l'état dont le silence ne rassurait pas les acteurs politiques de l'opposition, qui voyaient dans son mutisme devant les tonitruantes déclarations de ses partisans qu'un acquiescement tacite.
La communauté internationale à la rescousse de l'imbroglio politique congolais
Le Congo-Kinshasa comme toujours en période de crise donne des signes de vive inquiétude à la communauté internationale. Ce qui pousse le conseil de sécurité à adopter la résolution 2277 dans laquelle il encourage les acteurs politiques congolais au dialogue et appuie la proposition de médiation qu’avait initiée l’union africaine en désignant un facilitateur de la dite concertation entre les politiques congolais en la personne de Monsieur Edem Kodjo. Comme par le passé, les crises congolaises ont toujours eu comme arbitre une personnalité extérieure, sur qui pèserait un soupçon de neutralité, permettant aux partisans de croire en l’impartialité de l’autorité dont il bénéficiera.
À peine qu’il prenait ses fonctions pour piloter ce dialogue dont l’idée avait d’abord divisé l’opposition, jusqu’à aboutir à un consensus total, Edem Kodjo est récusé par une partie de la classe politique, qui l’accusait d’être proche du président Kabila, en ce sens qu’il n’avait pas rempli certains préalables qu’elle avait exigés avant la convocation du dialogue.
En dépit de tout, Kodjo organisait son dialogue avec une partie de l’opposition et la majorité présidentielle, ce qui aboutira aux accords du 18 octobre dont la conséquence directe sera la nomination de Sammy Badibanga, un transfuge de l’opposition radicale, comme premier ministre.
Le dialogue de la conférence épiscopale nationale du Congo en dernier ressort
Devant une pression populaire qui grognait, devant les incertitudes qui planaient sur le pays, l’église catholique entamait une seconde consultation politique pour inclure les boycotteurs de l’accord du 18 octobre. Ce geste apparaît dans un climat politique inflammable où nul ne savait vraiment de quoi serait fait l’avenir après la date d’expiration du mandat de Kabila dont les services de sécurité avec des moyens colossaux se déployaient déjà pour quadriller les carrefours importants de la ville de Kinshasa.
Après moult tergiversations de la part de toutes les parties, y compris de la part des signataires de l’accord du 18 octobre et les autres protestataires - les contestataires de l’impérium qu’exerçait le rassemblement sur l’évolution de ce processus de négociation, un consensus est trouvé in extremis le 31 décembre à travers lequel il est stipulé que les prescrits constitutionnels limitant le nombre de mandats présidentiels ne seront pas touchés, qu’il n’y aura pas convocation d’un quelconque référendum populaire sur le changement de constitution et enfin la ferme volonté d’organisation des élections libres, démocratiques et transparentes, mais aussi avec la promesse qu’un gouvernement de transition serait mis en place avec comme l’une des missions principales l’organisation des élections sous la conduite d’un premier ministre issu de l’opposition.
La primature, un appât qui a fini par refroidir la hargne de l’opposition
Dès cet accord signé, c’est de la sémantique que vont naître les premières confusions avec des expressions telles la signature sous réserve, la nécessité de conclure les arrangements particuliers.
Sans passer par un vote démocratique capable de faire taire toutes les divergences autour de la personnalité de l’opposition capable d’assumer cette fonction, une certaine frange de cette opposition distillera un nom que la majorité par un tour de passe-passe récusera en prétextant le pouvoir discrétionnaire du président Kabila de choisir parmi les noms que lui proposerait le rassemblement.
Mais, déjà, cette prise de position de la majorité présidentielle n’avait pas plu au rassemblement, qui dénonçait une tentative malencontreuse de non-application des accords de la St-Sylvestre, alors que déjà, dans ce même rassemblement de l’opposition, des transfuges de dernière minute de la majorité, à qui a été confié un rôle  de proue, s’évertuaient à reconnaître à Kabila le pouvoir de choisir parmi les noms qui lui seront soumis, avalisant ainsi la thèse selon laquelle il revenait au rassemblement de proposer une liste de noms et non de désigner le premier ministre qui serait investi par ordonnance présidentiel.
Même si ce gouvernement avait vu le jour, comment aurait-il travaillé avec une majorité parlementaire toute acquise au président Kabila, avec toutes les possibilités d’éviction et de blocage que leur offrait le jeu parlementaire tout à l’avantage de la majorité présidentielle qui tient cette institution.
Oubliant que l’accord qu’ils ont signé pérennise dans la tranquillité le règne illégitime et illégal de Kabila, les acteurs politiques du rassemblement se perdaient dans un espoir de diriger un gouvernement qui ne savait arriver malgré que sa concrétisation ne fût acquise que dans les textes de l’accord, dont la garantie se trouvait dans l’implication de la grande et prestigieuse organisation qu’est l’église catholique.
La mort de Tshisekedi sonne le glas d’un essoufflement à la fois idéologique et consensuel
Face à un Kabila qui débordait en stratégies, le rassemblement ne semblait compter que sur le charisme de Tshisekedi pour y faire face. Seul son nom était brandi devant toutes les manœuvres dilatoires de la majorité. Lorsque Tshisekedi décédait inopinément en Belgique après avoir subi une intervention chirurgicale lors d’un contrôle médical, et qu’au pays, la mise en pied des accords de la st-Sylvestre, qui avait suscité tant d’espoir du fait de la foi excessive que les politiciens avaient en lui, marquait le pas, le rassemblement de l’opposition se retrouvait comme dépourvu d’énergie.
Autour de la dépouille du Lider Maximo, comme l’appelaient ses militants, un bras de fer sordide s’engageait entre le gouvernement du président Kabila qui voudrait lui offrir des obsèques officielles, la volonté des militants de son parti de lui offrir un accueil digne de son rang avec tous les risques de débordement que craignent les autorités en place et la direction du parti qui fait un honteux chantage au gouvernement illégitime et illégal de Kabila, auquel elle exige l’effectivité des accords de la st-Sylvestre avant que le corps ne soit rapatrié au pays et que conjointement l’organisation du deuil ne se fasse entre toutes les parties à la fois gouvernementale et de l’opposition. Ce qui est incontestable, c'est que la mort de Tshisekedi et les atermoiements de son parti sur le sort de sa dépouille mortelle sont une aubaine pour la majorité présidentielle et le président Kabila.
Guerre d’usure entre les parties pour le grand bénéfice du gouvernement Badibanga, ce qui laisse Kabila tranquille dans les lauriers de son pouvoir impie
Pour avoir obtenu plus d’une minute au-dessus de son mandat, sans effusion de sang, et ce, malgré toutes les pressions de l’opposition, jusqu’à ramener sur la table des négociations les plus virulents de ses détracteurs moyennant postes ministériels, lui laissant toutes les prérogatives régaliennes dévolues à un état, Kabila, dans son silence inconvenant, se dévoilait plus malin que toute la marmaille de déclarations tonitruantes des gens, bien qu’investis de la confiance populaire, ne savaient pas quoi en faire pour infléchir les positions sur la balance des rapports politiques dans le contexte du Congo-Kinshasa, où l’histoire et ses scénarios semblent se reproduire.
Dans cet imbroglio entre le rassemblement de l’opposition qui marchande le corps du Lider Maximo contre un gouvernement hypothétique, Sammy Badibanga et sa petite clique survivent, gèrent sans trop grande foi le pays qui sombre dans un chaos qui ne dit son nom.
Tshimbulu, Kimpese, Kinshasa et à l’Est du pays, les bruits de canon retentissent contre le peuple, des élans insurrectionnels de ceux qui ont compris l’infamie qui se perpétue sur le destin national, alors que les politiciens ne cessent de croire à un système plus que défaillant leur garantissant que des prébendes pour bien vivre.
Mais ce qu’il faut craindre au rassemblement, c’est l’usure - la fragilisation de cette union du fait de la disparition du leader historique qui faisait l’unanimité, l’impatience de tous ceux qui ont cru avec l’accord de la st-Sylvestre accéder aux postes, peut-être en résolvant aussi leur problème de chômage, mais aussi, la guerre de chefs, quand on connait la grandiloquence de personnalités controversées qui en constituent l’ossature.
Tout est question aujourd’hui de temps seul qui pourra nous confirmer, oui ou non, si Kabila a en face de lui un groupe homogène capable de lui mettre les bâtons dans les roues sur le projet de pérennité que ne cachent point bon nombre de ses lieutenants et partisans.
  

  

Commentaires

Articles les plus consultés