Quand l'instant devient incertain...

J’avais fini de mettre l’exercice au tableau pour ne pas trop penser jusqu’à oublier ce pourquoi j’étais dans cette salle. En finissant, j’associais chaque élève à la résolution d’une question. Ce qui faisait que les attentifs se jetaient déjà à la résolution des exercices suivants avant même que je ne leur questionnasse. Avant que je ne les désignasse, ils bredouillaient déjà des mots approximatifs qui frôlaient l’exactitude de la réponse. Je les sentais impatients, enluminés par le désir de faire entendre avec certitude ce qu’avaient compris leurs esprits, ainsi se rassurer d’avoir assimilé la matière. La fille cherchait à croiser mon regard mais je faisais de mon mieux pour que cela n’arrive point. Difficile de ne pas faire de la suspicion autour d’un duel latent pour moi qui suis habitué à cet exercice comme l’on porterait les doigts au visage pour se frotter les yeux en cas de démangeaison. Une impression d’être dompté par les flots de cette algarade à la limite d’une escarmouche que j’avais pu éviter. Je sentais l’élève remplie d’une aura maléfique qui semblait bourrer la salle, son visage flasque suintait de cette assuétude que pouvait remarquer n’importe quel individu avisé, ses yeux corrosifs enrobaient tout mon être comme si elle en espérait un bénéfice. Un bénéfice qui probablement coïnciderait avec le summum de son plaisir. L’instant m’échappait, sa pleine maîtrise s’émaciait derrière toute la litanie de mots qui coulait de mes lèvres professorales. J’étais mal à l’aise.