Au confluent de plusieurs intérêts ténébreux, l'Est du Congo-Kinshasa se fait trucider..

L’EST DU CONGO SUSCITE DES AMBITIONS CRIMINELLES DE SES VOISINS
En 1965 déjà, Idi-Amin et Milton Obote, deux politiciens ougandais furent accusés d'avoir organisé une contrebande d'or et de café depuis l'Est de la République Démocratique du Congo. Dans les années 80, la primatologue américaine Diane Fossey aurait été assassinée parce qu'elle aurait découvert un trafic d'or entre les milices jusqu'au Rwanda. En 1998 après l'éviction de Mobutu éclate une seconde rébellion depuis les paisibles collines du Kivu avec pour objectif de renverser le président Laurent Désiré Kabila porté au pouvoir depuis mai 1997 par une coalition hétéroclite des armées rwandaise, érythréenne, ougandaise, angolaise et burundaise, ainsi que par quelques factions rebelles congolaises.
Cette nouvelle rébellion est le fait d’une mésentente entre le président Kabila et ses alliés rwandais et ougandais, qui ne se cacheront pas de soutenir une nouvelle insurrection par la création de deux mouvements politico-militaires dont le rassemblement congolais pour la démocratie et le mouvement de libération du Congo. Dès le début de cette aventure militaire, les forces armées ougandaises investissent les exploitations minières de l’est du pays et l’armée rwandaise en fait autant. Les deux armées se lanceront dans une sorte de rivalité dans l’accaparement des mines congolaises dont le clou se produira en juin 2000 avec la guerre de six jours à travers laquelle les armées rwandaise et ougandaise s’affrontèrent dans la troisième ville du Congo pour le contrôle des mines de diamant dont est pourvue la région.(1)
Jusqu’en 2003, l’année de la signature des accords de Sun-City ayant mis fin à la guerre civile congolaise et ayant permis le retrait des troupes ougandaises, le rapport de Human Rights Watch, cité dans le rapport sur la criminalité organisée et instabilité en Afrique centrale(2) , estime à neuf millions de dollars la quantité d’or extorqué au Congo par l’entremise de cette occupation militaire.
En 2002, juste une année après l’accession héréditaire du président Joseph Kabila au pouvoir, sous l’impulsion de la banque mondiale, un nouveau code minier sera élaboré pour promouvoir l’investissement privé dans le secteur. Se conformant aux prescrits légaux, deux entreprises vont se voir octroyer des permis d’exploitation dans la riche région de l’Est du pays, il s’agit de Randgold Resources à Kibali dans la province orientale et Banro à Twangiza dans la province du Sud-Kivu. D’après l’estimation du rapport de la banque mondiale(3), la zone aurifère de l'Est du pays contiendrait de l'or pour une valeur de 850 tonnes.
À côté de ces exploitations de grande envergure, subsistent des activités similaires d’exploitation artisanale du filon aurifère dont la commercialisation est soumise au diktat de différents groupes armés qui pullulent dans la région. Et, il n’est pas rare de constater la présence de militaires de forces armées de la République Démocratique du Congo agissant comme intermédiaires incontournables dans la faisabilité de ce commerce. En effet, depuis les accords de Sun City ayant mis fin au conflit congolais en 2003, l’Est du pays connait une démultiplication de groupes armés qui, sous le prétexte de combattre pour la démocratie, se livrent au trafic de minerais avec la complicité inavouée des pays voisins dont le Rwanda et l’Ouganda comme l’atteste ce rapport d’human rights watch(4) : « Les activités d’extraction et de commercialisation de l’or sont contrôlées par les groupes armés et leurs alliés en affaires. Ils écoulent cet or hors du Congo en direction de l’Ouganda via un réseau de commerçants qui opèrent hors des canaux légaux. »
Principalement pour deux minerais que sont l’or et le coltan, le premier est exporté via l’Ouganda et le second via le Rwanda(5), cette situation est à la base de plusieurs initiatives de pacification par les armes de la part des autorités de Kinshasa.
LES FORCES DE SÉCURITÉ CONGOLAISES POUR PACIFIER LA RÉGION, UN DÉFI INCERTAIN
En envoyant l’armée congolaise neutraliser les groupes armés qui contrôlaient des zones minières entières à l’Est, surtout pour des militaires mal payés évoluant dans une structure en déliquescence comme tout ce qui représente l’état dans ce pays, dans un contexte où l’illicéité parait plus que tentante que le respect de quelques formes de lois et de règlements, les autorités de Kinshasa n’ont agi que sur la forme et non sur le fond car la tranquillité, dont avaient besoin les mineurs, ne dépendait que des hommes en armes qui n’aident pas à imposer le code minier par l’entremise des agents de l’état commis pour la cause, mais s'évertuent à la satisfaction de leurs propres désidératas de s’enrichir sur le dos des mineurs.
Dans le rapport du groupe d’experts sur la situation en République Démocratique du Congo(6) datant de janvier 2015, il a été clairement établi cette responsabilité de certains officiers de l’armée congolaise dans le trafic des minerais, du paragraphes 160 jusqu’au paragraphe 172, des témoignages de l’implication ont été étayés avec l’exportation frauduleuse du coltan depuis Rubaya dans le Nord-Kivu jusqu’au Rwanda, et toujours dans le même rapport, il est signifié que dans les mines de Punia et de Lubutu, les militaires imposent des taxes illégales.
En décembre 2013, un incident a failli dégénérer entre les militaires de l’armée nationale et la police des mines et l’objet du conflit était un partage contesté autour d’une somme perçue des creuseurs artisanaux dans une mine d'or près de Kalémie(7).
Dans le document des nations sur la criminalité organisée et l’instabilité en Afrique centrale, à travers les pages 68 et 69, l’évocation est faite sur l’intérêt patent dont les exploitations aurifères feraient l’objet de la part des officiers véreux de l’armée congolaise. Pour contourner les contraintes légales de ce commerce d’or, les principaux négociants dans les villes de Bukavu, Butembo et Goma versent des pots de vin réguliers aux officiers supérieurs. Les officiers subalternes, quant à eux, proposent des tarifs préférentiels dans l’approvisionnement des sites miniers en articles de première nécessité, ils organisent aussi des trocs moyennant une certaine quantité d’or avec les creuseurs.
Par ailleurs, dans le rapport de l’International Peace Information Service intitulé « chaines d’approvisionnement en minerais et liens avec le conflit dans l’Est de La RDC (8) »,  aucune allusion n’est faite à une ingérence particulière des forces armées dans l’exploitation des minerais, mais plutôt, elles s’appliquent dans une fiscalité informelle et systématique sur une population de 6000 artisans miniers pour le seul centre de production de Kamituga, or l’armée congolaise est présente sur une mine sur trois à l’Est de la République Démocratique du Congo, facile donc d’imaginer la taille des revenus qui passe dans les poches des militaires.
 Même qu’en 2009, des éléments de l’armée congolaise se sont permis à la fois d’exploiter et de taxer comme toujours illégalement toutes les mines à proximité de Masisi dans le territoire de Fizi; ils sont allés jusqu’à conclure des accords avec un groupe rebelle (les Mayi Mayi Yakatumba) pour bien assurer  leurs objectifs de rentabilisation des activités illicites autour du commerce aurifère.
Dans ce panorama d’intérêts obscurs, il s'y trouve aussi toute la complexité de la crise qui sévit depuis plus de vingt ans à l’Est de la République Démocratique du Congo, surtout l’incapacité des autorités congolaises à faire respecter les lois et à exiger la fin de toute implication des autorités des pays voisins dans la fraude internationale qui prolifère autour de l'or et du coltan congolais, mais aussi la taille de l'inaptitude du président Kabila à diriger un si grand pays s'affiche au grand jour.

Commentaires

Articles les plus consultés