Enfin, elle m'avait trouvé à la gare....
Dès que le train s’arrêta, elle
avait les yeux rivés dehors. Son regard avivé me cherchait sans relâche, et ne
se relâcha que dès qu’elle m’avait vu. Un souffle de satisfaction fut expiré de
ses narines petites sur son nez pointu. Ses pieds se hâtèrent en ma direction
et mes bras enroulèrent son corps charnu qu’elle laissait étreindre avec
passion. Nous sommes restés collés pendant plus d’une minute, aucune parole ne
sortait de nos bouches, il ne s’entendait que des soupirs doux et tendres
tentant d’apaiser une fébrilité se mouvant dans les abysses de nos êtres en
communion.
Discrètement, ma main longea la
sienne, et je m’emparais de la manche à tirer de sa valise. Une lourde valise
que drainaient des roues sur le pavé de la gare de Lausanne, faisant retentir
un roulement que ne savait enterrer le tumulte de voix indistinctes qui résonnait
dans la grande bâtisse de pierres et de béton.
Un bâton cogna mes pieds
timidement, en me retournant, j’aperçus un monsieur avec sa petite canne bien
collée sur les tracés aidant les malvoyants à se guider le long de la voie
ferrée. Je susurrai à ma belle amie doucement des mots pour que nous nous
écartions de sa route afin qu’il continua son chemin. Nous descendîmes d’un pas
allègre la rampe qui conduit sous la gare afin de prendre la direction qui mène
vers les arrêts de bus.
Le visage de ma charmante amie me
souriait. Une félicité à fleur de peau y était bien perceptible, dans le fond
de son regard brillait une incandescente flamme de bonheur que pouvait
percevoir même le plus inattentif des observateurs. Dans la moite chaleur qui traversait
maintenant la ville en ce temps estival, je sentais ma main s’humectant de sa
sueur sur sa hanche brinquebalante à chaque pas. Sa peau qui était mouillée se
voyait couverte par cette robe moulante de coton qu’elle portait, mettant en
exergue ses courbes abondantes et pulpeuses qui incendiaient mes sens, jusqu’à
me faire perdre la conscience.
Des regards indiscrets s’accumulaient
chemin faisant, nous faisions fi, plongés dans l’ivresse de cet instant
précieux où nous communiquions plus dans le silence tendre de cette passion qui
nous consumait qu’avec le son des mots. Sa tête, malgré que nous marchions, s’affalait
sur ma poitrine, des fois, sur mon
épaule gauche dans un plaisir incontinent ; ses mains caressaient les
veines visibles sur la peau de ma main, les bouts de ses doigts frêles et
spongieux allaient et venaient comme pour compter avec exactitude le nombre des
rivières de sang que j’avais.
Dans le bus, je sentis que son
excitation s’était apaisée, sa respiration était plus calme, presqu’inaudible :
les intervalles entre l’inspiration et l’expiration de l’air étaient devenus
réguliers. Sa main frottait maintenant mes doigts instinctivement. De temps en
temps, un sourire simultané nous réunissait dans un baiser plein de complicité,
ses lèvres humides et molles se collaient aux miennes avec élégance et suavité ;
un souffle chaud en émanait dès que nous décelions cet enlacement buccal, qui
se faisait plus attractif lors du desserrement que de son initiation.
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