Le corps avachi d'un homme que l'existence a vomi...

Le corps se déprécie, dans les profondeurs de ses silences s’entend le chuintement d’une scie, le métabolisme résiste, mais la charge agressive est telle que les muscles s’atrophient, les os qui, hier, étaient engloutis dans la chair surgissent, fiers de paraître devant la face du monde afin de révéler avec exactitude les contours de l’anatomie. 
La fierté de l’homme s’amenuise dans cet état où l’apparence n’attire plus aucune convoitise, car elle se voit toiser par des regards malsains, couvert de dédain aussi, rappelant à l’esprit l’engeance que l’être qu’il vivifie était devenu.  
Une honte que ne savaient supporter ceux de son espèce, un crachat qui n’avait de place que dans les détritus d’une humanité en disgrâce, même la compassion des hommes semblait lui être prohibée, la clarté qui auréole la vie s’était obscurcie dans le ciel de son existence que nulle attention ne lui était plus dévolue, l’oubli avide d’avaler la proie qu’il était, le presser de s’engouffrer dans le canal de sa gorge étroite afin de tailler son ego dans les strictes mesures de l’humiliation. 
Blessé dans son estime propre, l’individu ainsi classé au banc de ce que vaut l’homme vomi par les siens, subit l’insupportable charge du déni d’exister, il est aligné dans la fourrière où sont classés ceux qui portent le sceau de l’obsolescence. 
Reclus dans ce déshonneur reçu, pétri dans l’humiliation exponentielle que lui offre la destinée, l’individu courtise les maux afin de leur donner une beauté esthétique, avec les mots, tissant des textes subtils et d’une légère désinvolture, emplis de séduction insidieuse et provocatrice qui titille la conscience discursive de ses congénères. 
Ainsi des lettres s’entremêlent, les sens et les essences se fricotent dans une muette complicité et, enfin la feuille blanche se comble des graffitis que le cerveau prend plaisir à décrypter, réveillant comme par surprise toute la stupidité de ce traitement qui lui est infligé. La souffrance devient alors le creuset où se féconde une éclosion abondante de métaphores, qui décrit l’absurdité de la méchanceté humaine. Dans la valse de ces horribles peines, qui ensemencent sa poésie, l'homme voit un sourire s'imprimer sur ses lèvres en dépit de toutes les avanies. 

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