Un regard sur la Sallaz...

Une splendeur affriolante peint le panorama de ce lieu comme la clarté du soleil éclaire la vastitude du ciel, comme si le tableau d’en haut dans les nuages brille autant que celui d’en bas avec les pavés de béton, qui s’imbriquaient les uns à côté des autres, avec ces plaquettes de bronze sculptés. Bien que limité dans la vue, le vaste espace de la Sallaz parait illimité à l’esprit de la personne qui la voit la première fois, on y ressent une sensation d’infinie liberté, dont on ne sait pas trop quoi en faire, des fois ; une révélation s’incruste dans l’âme éperdue de cette allégresse que dégage cet endroit construisant déjà dans la tête des individus toute une complicité insidieuse que ne savent traduire les mots. Encastré entre les immeubles, dont les façades muettes observent non sans envie comment s’embellit ce milieu qui le traverse comme une arête de poisson. Sur un mur à côté d’une boutique exotique tenue par des indiens, s’affiche discrètement sur une petite pancarte de l’institution légitime de l’état exerçant de la violence dans le cadre du maintien de l’ordre public, sur la même rangée aussi s’alignent d’autres commerces allant d’une librairie à un chocolatier puis une librairie.
Un peu plus loin, c’est une station-service, presque fantôme, dirais-je, car, jamais on y voit quelqu’un à la vente, avec ces voitures d’occasion qui attendent acquéreurs après avoir longtemps servi ailleurs.
D’ailleurs, une fois, j’en avais vus une, qui m’avait plu, une petite coccinelle argentée de chez Volkswagen, puis je me suis rétracté parce qu’avec mes longues jambes, je me suis dit que certainement qu’il me serait bien difficile de m’installer à mon aise au volant.
En diagonale de cette station, se trouve l’immeuble de la poste avec son café restaurant portant le même nom. Je me souviens de la première fois que je m’y étais rendu pour poster une lettre, dans la petite salle où nous étions alignés, un petit enfant passait son temps à prendre les cartes postales exposées pour les présenter à sa mère, qui ne cessait de lui interdire de se livrer à ce geste qu’elle estimait malveillant. Pauvre mère, elle semblait dépasser par la témérité de son fils.
Lorsque ce fut mon tour de me présenter au guichet, la petite voix qui me reçoit sort d’une fine bouche bien maquillée avec délicatesse de rouge, posée sur un petit visage innocent qu’on serait tenté de croire que ce monde cruel ne lui est pas destiné, et qu’il serait à protéger tant transparaît de son regard une sincérité et une simplicité dont le monde d’ aujourd’hui ne semble en avoir cure.
La petite femme derrière les glaces du guichet sourit, ses mots remplis d’amabilité caressent mes oreilles, rassure le client que je suis, un dialogue se noue en toute confiance ; ma lettre entre ses mains est posée sur sa petite table, elle y appose des tampons, et me remet la différence en pièces métalliques. Je la remercie mes yeux dans le siens si limpides comme de l’eau de roche dilué dans le bleu du lac Léman. Avant que je ne parte, une raie subite d’intérêt  éclaire son regard timide, elle me montre les propositions de la loterie romande pour la soirée. Elle me dit que la cagnotte s’élève à 79 millions de francs. Les jeux de hasard n’ont jamais été dans mes cordes, poliment avec une esquisse de sourire, je décline l’offre, m’en vais après lui avoir souhaité une bonne journée.


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