Le sommeil de l'andouille....

Maintenant que se profilait au loin le frontispice de la maison familiale, une certaine trouille masquait sa trombine hébétée,  une conscience de l’acte qui l’avait posé comblait son esprit obscurci par la déraison, ses ongles portées à la bouche se découpaient presqu’instinctivement avec une célérité qui ne pouvait qu’attirer l’attention des passants. Entre de quatre balèzes, il était bien facile de voir combien il était mal à l’aise, combien facile était aussi de constater toute la difficulté qu’il en fût autrement. Devant la porte d’entrée, il apercevait le pendentif de la grosse citrouille que sa mère avait fixé pour l’empêcher de franchir le seuil, car il en avait une peur bleue depuis son enfance.
Dès qu’ils entraient dans la maison, son pas devint plus lent, des voix grouillaient de la pièce au fond du couloir faisant face à la porte principale, il semblait bien que des gens étaient en train de parler dans une ambiance relativement paisible, des rires se faisaient entendre dans un silence sinistre qui comblait cette grande bâtisse que nul ne savait ne pas voir sur le versant de la dernière colline au milieu de cette orangeraie.
Son regard hagard plein de stupéfaction semblait s’étonner de cette demeure où il habitait depuis sa naissance, comme si tout lui paraissait nouveau, au point que ses yeux grandement ouverts traduisaient maintenant une stupide lumière de curiosité. Sous bonne escorte, jusque dans sa chambre, il entrait et la porte était refermée à clé de l’extérieur, les cliquetis indiquaient qu’elle a été fermée à double tour. Dans la pièce où il se retrouvait, l’andouille s’assit sur le lit couvert de draps propres exhalant un parfum de jasmin que son nez reniflait dans un plaisir timide.
Dans sa tête, s’entrecroisaient mille et une pensées remplies d’idées de pacotille digne du cerveau qui était le sien, ragaillardissant la réputation était la sienne dans le village et ses environs. De la fenêtre condamnée elle aussi, les maisonnettes blanches de l’ancien village moyenâgeux qui avaient été rénovées et classées au patrimoine mondial s’apercevaient bien étincelantes avec cette étiquette que le monde de la culture internationale leur accolait.
En plein dans son brouillard cérébral, une admiration venait impromptue de susciter un friselis d’enthousiasme devant cette belle image remplie de charme que dégageaient ces maisons. Une belle aura que même la folie dans la tête d’une andouille comme lui pouvait percevoir.
Il s’affalait sur le lit fixant le plafond de ses yeux que comblait une joie sinistre derrière son visage triste, des larmes coulèrent lentement sur ses joues rondouillardes, jusqu’à la commissure de ses lèvres, le goût salin interrompit un instant ses sanglots, sa langue lécha un moment les rebords de sa grosse bouche, puis il se taisait complètement.
Une fatigue devenait perceptible dans son corps plein de graisse, il se sentait bien lourd de tout mouvement sur ce lit moelleux. Bien que l’estomac sous les talons, il lui était presque pas possible de se lever et de prendre fût-t-il un fruit sur la table de chambre où étaient installées de bananes et des oranges fraîches. Sans s’en rendre vraiment compte, l’andouille s’était endormie, ronflait comme une Maserati sur la périphérie de St Tropez, toujours avec une bouche active que malmenaient des paroles instinctives sorties tout droit des abysses de son sommeil.             
           

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