Les rendez-vous de Gariba...

Il reçut ses visiteurs sans vraiment penser à tous ces bla bla retentissants. Des mots juridiques, administratifs, coopératifs, un vocabulaire remplissant le dictionnaire Dalloz de droit international. Des palabres aux quelles un mouvement de corps ne semblait accorder point de sympathie. Des fois, un sourire instinctif traversait ses lèvres, édulcorant cet air grave qui s'était imprimé sur son visage assailli par le poids des responsabilités. N'était-il pas le chef de l'état de plus de septante millions d’âmes, pour lesquelles il avait la théorique obligation de matérialiser un bonheur collectif ? Surtout que, dans son discours de campagne, il a promis de moderniser le pays. Sous la houlette de son action, il avait juré que les gens de l'arrière-pays abandonneraient leurs pirogues pour sillonner les rivières et le fleuve en bateaux modernes comme on en trouve sur la seine à Paris. Les villageois le crurent en masse, votèrent en abondance pour lui avec l'espoir que leurs épaules, fatiguées de pagayer, allaient trouver en fin du repos. La modernité était pour eux un peu de repos pour l'homme, dont les efforts seront assumées à la machine. 
L'instant de se séparer du dernier visiteur, Gariba sentait monter une impatience derrière la braguette. L'homme en face de lui déversait des mots comme un fleuve, des syllabes sortant de sa bouche ensalivée, laissant en échapper quelques gouttes qui tombaient sur la table. Une envie de soulager sa vessie pleine était imminente, il se secouait les jambes légèrement, cherchant un temps de répit de son interlocuteur pour y glisser une excuse afin de se lever, ainsi s’éclipser, mais, malheureusement, aucune occasion ne fut propice ; alors, il se leva sans aviser, disparut derrière une porte au grand étonnement de son visiteur, dont les ultimes phrases perdirent toute leur tonalité subitement, car la surprise était de taille. Dans la petite pièce, où il se relâchait, s'entendait un jet qui pénétrait l'eau contenue dans la cuve. Un souffle de soulagement sortit de ses poumons avec une pression instinctive, et une déflagration retentissait de son postérieur bien arrondi par les kilos qu'il ne cessait de cumuler depuis sa prise de pouvoir. 

Commentaires

Articles les plus consultés