Un instant dans le calme de la nuit sous la pluie...

Le pas lent, la capuche recouvrant la tête où s'abattent des gouttelettes sans cesse, des tapotements intermittents ; d'ailleurs, la pluie s'est faite reine de temps ce soir. L'eau coule d'un rythme allègre dans l'égout. La brise réjouie occupe le vaste espace désert de monde, mon esprit en vadrouille dans le silence de la nuit songe, plonge dans ses profondeurs inextricables, sonde son volume en quête des mots muets, des sons dilués dans cette douce quiétude pour donner de la voix au charme d'après minuit, que certains yeux ne savent apprécier, que certaines oreilles ivres ne se plaisent qu'à entendre quand elles peuvent saisir la belle redondance sous-tendant l'harmonie de l'instant à travers lequel elle existe.

J'entend bruire des vaguelettes sur la berge , perçoit des lumières ondoyantes sur la surface du lac, l'obscurité voit sa totalité amoindrie, la ville s'aperçoit comme une chandelle d'infinies petites lumières en ascendant et en descendant des vallées et des collines, où des milliers de petites vies tissent la toile de l'existence humaine, écrivant à travers leurs gestes individuels ou collectifs un pan de l'histoire universelle. Le poète muré derrière son mutisme conte avec élégance dans le verbe le monde, le sien pour le grand bien de son prochain.  Les cygnes, loin des vignes, somnolent, le ciel est sans signes et d'un noir absolu. Un instant dans le calme de la nuit sous la pluie.