La colère du président...

Un souffle se fait entendre dans la chambre dès les premières lueurs du jour, une vibration sans intermittence retentit dans cette obscurité à peine éclairée où une grosse masse de muscles reste inerte. Des fois, ses jambes galbées se mouvaient sous les draps sans qu'elle ne se redressa, ses bras s'agitaient doucement...le visage boursouflé, le président entendit enfin le son que ne cessait d'émettre son téléphone. Les yeux encore fermés, il étendit la main à tâtons sur la petite table à coté de son lit, prit l'appareil, décrocha, puis le colla à son oreille. Une voix presqu' essoufflée par le respect et les circonstances se fit entendre.
Elle semblait impatiente, mais elle ne pouvait s’empêcher de se retenir par déférence. Elle commençait par une litanie de civilités, qui semblaient fatigantes. Assis sur le matelas, le président s'impatientait, son regard se remplissait de charisme comme d'habitude: l'attribut indécrottable de l'autorité, dans un pays où les apparences n'étaient point à négliger, avant de la palper à travers les courbettes de ses collaborateurs, et surtout sur les militaires, subalternes comme officiers. Las de cet appel de très tôt matin dont les secrets semblaient s'éterniser , une colère subite enflammait son esprit:
- Ça fait presque trois minutes que j'entend tes mots, et j'attend la raison de cet appel de si bonne heure, tu ne cesses que de raconter des tournures, qui ne disent absolument rien...merde, qui es-tu pour troubler ainsi mon paisible repos? D'autant plus que depuis que je gère ce.. putain de pays, il m'est difficile de trouver un sommeil relaxant...voilà qu'un rien comme toi, quelqu'un que je tirais de la paperasse de cette université pourrie pour en faire un homme respectable, se permet dans une désinvolture déconcertante de me réveiller sans dire mot, cria le président.
- Mais...Excellence...je viens de recevoir un coup de fil de mes services, le pays a été attaqué depuis ce matin à trois heures du matin, c'est dans la province du Taranga, une horde de rebelles se serait emparée de la ville des mines, d'après ce que j'ai entendu de Radio France Internationale. Les services affirment que nos forces tiennent encore la ville malgré une incursion des forces rebelles...mais personne ne sait vérifier la véracité de l'une ou l'autre version, conclut le ministre de l'intérieur d'une voix terne et timide, remplie d'hésitations.
Sur ces mots, Gariba fulmina des insultes dans un accès de colère tonitruante, se leva de son lit, se saisit de la lampe sur sa table de son petit coin de travail en chambre, la fracassa sur le sol, donna un coup de pied à la chaise sur la trajectoire de ses pas trépignant de rage; le grabuge ameuta des militaires et des civils du palais, dont quelques uns seulement se permirent d'entrer pour essayer de calmer la colère du chef. Déjà tous étaient au courant de l'attaque que subissait le pays par le biais des ondes de Radio France Internationale, facile était-il pour eux de deviner les raisons de ce tonnerre matinal dans la chambre présidentielle, toujours en ligne au téléphone, le ministre de l'intérieur se rendait compte de la réaction caniculaire qu'il aura à supporter en cette longue journée de travail , qui commençait très mal par ces événements sollicitant son ministère dont les agents préféraient rançonner les paisibles commerçants et traquaient les langues libres proférant des critiques contre le régime.

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