Le silence de la nuit et les mots.

La nuit est calme, l'avenue marchande où se trouve mon immeuble est déserte. Une fine pluie ne cesse de tomber. Un froid timide suit le vent, un bruit fin s'entend de son souffle caressant les façades de murs inertes, bien humectés de ces gouttelettes d'en haut. Le temps est maussade, la chaussée enduite d'eau se voit abandonner à la solitude, la ballade est orpheline sur le parvis de l'instant nocturne. Le silence règne en imperturbable souverain malgré que s'entendent quelques pas téméraires déchirant et incisant son pouvoir mythique. 
Avec l'obscurité pendante, les lampadaires luisent sur des étendues publiques, qui resplendissent de lumière devant l'assaut permanent du noir ambiant. Les bâtiments du centre-ville semblent au repos avec l'absence des va et vient incessants des hommes, quelques roms se hâtent de prendre place non loin du palais de justice; les mains remplies de bière qu'ils ne cessent d'ingurgiter malgré la température aigre. Frileux, je marche avec hâte aussi, l'air empressé de disparaitre derrière les murs de la demeure où j'habite, afin de ne point soumettre mon corps à une épreuve qu'il ne sait supporter. Dans ma tête, un texte dandine depuis le matin: des mots en suspens retentissent. Des mots comme maigre, pègre, nègre, terre, pauvre, mièvre, lèvre, et bien d'autres encore s'entrechoquent dans les dédales de mon cerveau, titillant l'inspiration qui semble être séduite par la redondance des sons et des tons. Une envie subite d'écrire chatouille la modeste main plongée dans ma poche. 
Émerge de mon esprit aussi une succession des combinaisons cherchant une symbolique, un message induit de simplicité à la lecture, infusant à l’être une certaine légèreté utile dans son assimilation où une certaine quiétude prend quartier dans les abysses de l’âme. Ainsi, je hâte les pas pour ne point perdre ce bouillon, qui traverse ma tête avec son avalanche de mots et des sens, afin d'immortaliser cette composition sortie de cette interaction entre le monde et ma modeste sensibilité: une insémination silencieuse.
Une fois devant la table de bois, le papier bien vierge me regarde afin que je déverse la lettre de cette inspiration; ma main essaie de la traduire avec fidélité pour que la satisfaction remplisse mon être.   
Dans ce silence plein qui remplit la nuit, l’ouïe ne perçoit plus que le glissement de mon stylo, dont l'encre est entrain d'inscrire sur la feuille blanche et réceptive les différentes palabres que je griffonne.     

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