La brouille était alors inévitable....

Je me tais derrière mon silence où les palabres s’écrasent sur la palissade de mon regard placide. Je hais ses incartades : ses plaisirs désinvoltes qui tissent les doutes et les incertitudes dans le fond de mon esprit, mais je ne dis mot. Mon regard s’assombrit de colère que je ne sais et ne veux exprimer, tente de me réserver pour faire preuve d’une maîtrise de soi : contrôler mes émotions en imprimant un simulacre de quiétude dans mes yeux remplis de rage. Le sage, je m’efforce de rechercher dans les abysses de mon être. Alors le silence m’est un salut pour ne pas laisser exploser la fusion de ce courroux qui me titille depuis qu’elle m’avait annoncé cette nouvelle qui ne m’enchanta guère.
Mon cœur ne supportait qu’elle se fit visiter, qu’elle ne me fit aucun compte-rendu, une habitude qu’elle avait instituée de son propre gré, ainsi je m’attendais à ce qu’elle me fit part de ce que fut sa conversation avec cet ami qui était venu la visiter. Mais il en fut rien, absolument rien. Cela me faisait grincer les dents, burinait mon front des rides même au milieu de la nuit dans mon sommeil. Mon regard sombre de rage se noyait dans l’opacité de l’obscurité pensant à toutes les choses sordides que sa langue ne savait éclairer avec des mots simples comme lorsqu’elle me contât les précédentes rencontres.
Dans ma tête, des supputations s’élevaient, se croisaient, se mêlaient, se brassaient ; je faisais de mon silence un trou béant avalant tous les tumultes qui se mouvaient sur mes cordes vocales que je tentais d’apprivoiser.  Je prétextais une intense activité qui m’empêchait de la voir ; mes sourires, quand nous pouvions parler au téléphone, occultaient cette rancœur que je cherchais à atténuer derrière une gentillesse de façade, savais que tout va s’effondrer.
Alors, je ne voulais la voir pour que le temps dépolit les paroles incisives dont je ne saurai faire l’économie si nous nous voyons, je me retenais donc, faisais semblant pour ne point embraser nos instants frais de vie commune.
Désormais, je n’étais plus l’homme que je fus à ses côtés, parlais moins, mes lèvres se fendaient difficilement pour lui faire un sourire sincère, elle ne m’inspirait plus que des soupçons ; de temps en temps, je la confondais avec ses propres mots, la confrontant à ses propres contradictions sur des faits allégués précédemment. Le poids de mensonges s’accumulait, les conversations devenaient mesurées, de plus en plus je prenais de la hauteur derrière l’impassible silence que je m’octroyais, elle se rendait compte que quelque chose clochait, posait des questions auxquelles je ne répondais qu’évasivement.

Son enthousiasme se dépréciait, des incertitudes comblaient sa bouche qui ne savait plus entonner avec fluidité des mots de tendresse comme avant. Nos rencontres devenaient courtes. Elle tentait de comprendre ce qui arrivait, mais je me refusais de lui révéler là où le bât blesse. Un certain dégoût s’enracinait, prenait quartier. Je ne prêtais plus attention à ses requêtes auxquelles je ne réservais que d’évasives  réponses, qui ne me liaient guère. L’indifférence s’était accrue, cela me semblait mieux, mieux pour ma tranquillité.      

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