Lausanne brille et vit...

Le soleil brille dans le ciel, une chaleur se fait permanente, la vie est embellie, les rues de Lausanne s’emplissent de monde. Des gens aboulent de toutes les directions. Les tenues décolletées s’aperçoivent de partout. Les corps s’extasient de cette hausse température, une passion de vivre se rallume, une certaine dose d’enthousiasme semble perceptible à l’air libre, accessible à qui veut en user. Des groupes s’installent à travers les espaces publics, des canettes de bière passent de main en main et leur contenu finit dans les estomacs déjà remplis de grillades. Immergés dans l’inspiration éthylique, les cerveaux imbus d’alcool, ils ont l’esprit apprivoisé par un élan d’un autre genre, une subtile allégresse dont les mots remplissent leurs bouches de galéjades. Des rires s’entendent, s’étendent, s’estompent ; les conversations s’étirent, s’inventent sans désemparer.
Les lèvres s’ouvrent, ingurgitent et se ferment. Les arbres, sous l’impulsion d’un vent venu des hauteurs enneigées surplombant le lac, s’agitent d’un geste enjoué transpirant le plaisir du beau temps pour tous les êtres.  Des lueurs hyalines traversent la pénombre des feuillages jusqu’à peindre le gazon des fresques lumineuses sur lesquelles s’amusent les enfants ; ils s’attèlent à suivre ces images, qui se  déplacent au gré des branches que le vent balance et fouette dans son courant intermittent. Vidy est plein. À l’autre bout de la ville, la place de l’Europe au Flon ne désemplit pas, des jeunes ne cessent de l’investir ; une incontinente gaieté émerge de leurs accolades, des cris hystériques pour les sensibles. Les blousons se lâchent sur le pavé de goudron, des cercles se forment entre les groupes, la multitude de voix sombre dans le bruit ambiant obnubilant le lieu. De deux bouches de métro de part et d’autre de la place émergent sans cesse des passagers, qui se faufilent entre les piliers de fer et de béton soutenant la passerelle au-dessus dont l’ombre se répand en contrebas.

La foule s’empresse, passe dans l’indifférence ; quelques hommes assis dans un coin, bien pieux, la regardent avec des yeux remplis de muette mendicité, de la sollicitude qu’ils espèrent susciter dans les cœurs, attendant des heures que le résultat de leur prière tacite ne devienne effectif. Alors ils ne se fatiguent point de tendre la main à toute âme qui bouge, pourvu qu’une pièce, même modique, leur tombe sur la paume. Dans les trames de cette chenille motorisée qui traverse la ville sous le sol depuis les berges du lac jusqu’à ses sommets, le plein de passagers est perceptible et visible. Les corps se touchent, transpirent, et se détachent dans un tumulte indistinct qui se mêle et se démêle. Lausanne semble ressusciter avec les temps chauds. Une autre vie prend corps dans le quotidien de cette cité bâtie sur la roche.  

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