Avant que je ne plaidasse pour elle...

La literie exhalait une odeur de lessive enivrant l’esprit sur ce matelas. Son regard avec ses cheveux hirsutes laissait filtrer un insolent charme que mes yeux ne savaient éviter. Mes instincts se rebellaient, une passion fulminait depuis les abysses de mon être.  Ses lèvres agitaient dans un flot ininterrompu d’onomatopées que mes oreilles ne savaient point décrypter. La lumière irisée, dont les lueurs perçaient les énormes glaces de fenêtres, faisait luire sa peau d’ébène,  son sourire peint de blanc semblait se marier avec la splendeur sainte que dégageaient les draps. Elle était mannequin d’une grande marque de vêtements. Ses belles jambes glabres et pliées parcouraient des podiums de renommée internationale de la mode féminine, m’avait-elle confié le matin de notre première rencontre.
 Nous nous étions vus au bar de l’hôtel, où je venais d’aménager pour une semaine de mission à Ibiza. Ce matin-là, je me dépêchais car je devais rencontrer des entrepreneurs pour parler affaire, les portes de l’ascenseur se refermaient déjà, quand  lestement, j’arrivais de glisser mes bras pour stopper le mécanisme et y prendre place. Mon souffle était haut, ma cravate desserrée, mon front suant et buriné fixait le pavé l’instant que je me reprisse. C'est là, après l’euphorie de l’effort, que je me rendais d’abord compte de ses jambes, belles et galbées de couleur de bois laqué de cire : elles me parurent longues et fines, d’un inouï et indicible raffinement qui calma subitement toute l’agitation dont je faisais montre.
Ma tête se levait doucement. Mon regard parcourait le moindre millimètre de son corps qui se tenait bien généreux et rempli de bonté de son espèce, qu’une stridente sensation commençait à retentir depuis les pores, infiltrant les os jusqu’à se perdre dans les dédales de mon corps que je tentais de maîtriser. Nous étions face à face, je m’inclinais d’un geste galant pour la saluer, son allègre regard enveloppait mon visage, qui se comblait d’un embarras que je savais cacher. Un silence reprenait la main sur les instants où nous n’entendions plus que le crissement de l’ascenseur sur les cordes actionnant ses montées et ses descentes.
-          Tu es avocat ? j’ai cru entendre dans cette cabine qui semblait conquise par la tranquillité de ce silence que je ne savais vraiment briser malgré le poids des appétences. La question m’avait bien surpris, mes lèvres balbutièrent quelques instants avant que je me ressaisisse.
-          Je suis avocat, si, je le suis…comment l’aviez-vous deviné ? lui répondis-je  d’un air un peu déconcerté.
-          Mon ex-mari l’était et je sais un peu comment ils se prennent la tête quand ils ont une importante affaire à négocier. Ton mignon visage assombri par le poids des responsabilités me rappelle le sien.
Au rez-de-chaussée, elle me gratifiait d’un sensuel sourire, sa main effleurait tendrement ma trombine, mes narines pouvaient humer la suave odeur de son parfum. Elle me glissait un petit bout de papier dans la main en s’approchant, bien collée à mon corps, une bise se déposait sur ma joue droite. « À ce soir, mon beau Roméo, j’aimerais bien te revoir, me susurrait-elle avant de me quitter avec ses pas gracieux.» bien perplexe je suis resté, ma serviette entre les mains, je la suivais de regard jusqu’à ce qu’elle ait disparu derrière la porte du restaurant.
Je reprenais mon esprit en cliquant les yeux, devais vite me mouvoir pour ne point arriver tard à la réunion. Le soleil éclairé le ciel sans parcimonie, les oiseaux chantaient à tue-tête, m’engouffrais dans la banquette du premier taxi jaune, l’habitacle sentait le café, le chauffeur en buvait en me posant des questions sur ma destination. La saveur exotique me fit penser à Bogotá où je m’étais rendu il y a deux jours.












                                                                                                                                                            

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