A nouveaux bannis...

Sous la lumière désormais nous existons, sur la marge de l'humanité presque nous avons été alignés, nous n'étions plus que des chiffres, des quantités à manipuler ; un déni total nous comblant d'une averse d'iniquités, nous entendions ce discours séduisant les cœurs jusqu'à susciter le rejet tacite des étrangers que nous sommes, nous souffrions dans le silence comme des malfrats attendant l'heure de la potence avec inquiétudes.

Dans la piété et l’honnêteté, nous nous insurgeons contre ce régal de triste de sort dont nous gavaient d'autres hommes, de qui nous ne sommes point différents, mais qui se sont murés  derrière l'inhumanité des lois pour se laver de la culpabilité de cette précarisation que nos destins subissaient de plein fouet, rendant encore difficiles nos vies drainant des plaies encore fraîches des péripéties et des vicissitudes de nos passés si aigres.

La paix, dont nous rêvions, s'était transformée en une misère à demi teinte, au lieu d’être des rescapés, nous n'étions plus que des martyrs d'un désespoir impudent et impromptu, nous luttions désormais contre cette paupérisation et le poids de ce déshonneur qui s'affalaient sur notre amour propre, nous avions survécu à l'horreur et aux brimades de tous genres en bravant des périlleuses contrées où sévissait le carnage sans scrupules de la vie, nous avions atteint vos pays, non parce qu'il y coule le lait et le miel, mais parce qu'il est chanté dans le monde entier que la dignité de l'homme y est respectée, et, l'être y a de la valeur, quel que soit l'état dans lequel il se trouve.

Malheureusement, une bien amère expérience nous est offerte en guise d'excellente hospitalité, nous habitons une confortable bâtisse enfouie dans la terre : un trou calfeutré de béton de tous bords où il est strictement impossible de perdre son regard dans le beau paysage d'automne de votre pays, nous mangeons une nourriture préparée sans foi et sans cœur, livrée dans une indifférence complète de nos goûts et de nos désirs ; des plats presqu' imposés comme à des gens bannis de tous droits au nom de l'asile et de l'immigration.

Nos regards portent les stigmates de ces plaies profondes et ouvertes que drainent nos âmes d'hommes seuls livrés aux caprices d'une oppression inattendue ; nous résistons contre cet oubli dans lequel l'on voudrait nous enterrer. Nous vivons une intimité collective, complice et transversale où nous partageons les joies et les peines, nous sommes une communauté de gens déchus de chez eux, des individus à la merci d'un implacable destin de sans patrie, loin des souvenirs qui ont fait de nous des êtres chers aux leurs et à leur communauté.

Nous résistons grâce à l'amitié, à l'amabilité et à la solidarité des gens sensibles, un petit sourire dans un bus, une parole aimable dans un train, un gentil geste dans la rue nous rassurait d'être parmi les hommes, entre les nôtres, dans un autre coin de l'humanité.

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