La montagne et la colère insupportable ...

J’adorais la solitude de la montagne, son imposante masse silencieuse devant toutes les provocations de la modernité. Elle était d’un mutisme imperturbable, d’une absolue maîtrise sur son potentiel de puissance. J’enviais cette extraordinaire vertu dont elle seule avait réellement le secret. 
Des fois, elle souffrait d’une ingestion du silence, elle en avait trop digéré et vomissait de ses entrailles un jet interminable de dégueulis de sa colère bruyante. 
La regardant, je me consolais de la normalité de mes effusions de rage, presqu’ une vague incontinente, qui avant me paraissait un excès subi et subit balayant tous mes efforts de posséder complètement mon être. 
Parfois, j’en étais bien hébétées, m’enflammer jusqu’à cette ampleur comme une étincelle tombant dans une matière inflammable, une incandescence latente que cachait bien ma timidité innée ; d’ailleurs je luttais sans relâche pour ne point me fâcher, un geste qui m’était bien fatal, car, dés les instants de son effondrement, une salve de remords mouillait ma conscience que j'accablais des récriminations multiples : une punition de mes instincts sur ces impulsions que le corps ne savait contrôler. 
Ma souffrance était lente et douce, d’une longévité discontinue, je ne savais quand elle prendrait fin ; mais aussi, je ne m' empêchais de ne point souffrir : elle était la contre partie utile pour que mon être se satisfasse d’avoir fait son pèlerinage au purgatoire, ainsi allégeant de toute aporie de péchés. 
J’étais le martyr de mes propres incontinences, et la sanction s’enclenchait automatiquement ; elle me faisait un bien expiatoire après l’avoir endurée.



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